C’est par la danse que Camille Pépin, l’une des compositrices les plus prestigieuses de sa génération, se découvre un goût pour la musique classique. Lauréate du concours de composition Île de Créations en 2015, elle reçoit la même année le Grand Prix Sacem de la musique symphonique (jeune compositeur) puis un Prix de l’Académie des Beaux-Arts en 2017. L’année suivante, elle figure parmi les 30 Eclaireurs de Vanity Fair. En 2020, elle est compositrice de l’année aux Victoires de la Musique Classique. Elle est nommée Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres, en 2022.
Aujourd’hui, elle revient sur son parcours, ses inspirations et son amour pour la création musicale.
À tort, bien sûr !
Le son d’un orchestre a quelque chose de magique. Tout est possible à l’orchestre : de l’émotion la plus ténue à une puissance majestueuse. Pour moi, ce qui pourrait déconstruire l’idée de la musique symphonique élitiste, c’est tout simplement de plus la diffuser, de l’avoir dans des cercles différents.
J’ai d’ailleurs pu voir l’impact et la capacité qu’a cette musique à parler au plus grand nombre.
Un jour, un adolescent qui ne connaissait pas du tout la musique symphonique est venu me voir en concert grâce quelques vidéos YouTube et surtout, grâce à sa professeure de musique qui lui avait parlé de mon travail.
Lors de notre rencontre, il m’a confié que ça avait été une révélation pour lui et qu’il reviendrait écouter l’orchestre. Comme je le disais, il faut exposer des publics non-initiés à la musique symphonique… On n’est pas à l’abri d’un coup de cœur !
Dans la continuité de ce que je disais, je trouve dommage que la création ne soit pas plus présente dans les programmations. Elle est, la plupart du temps, donnée au sein d’institutions spécialisées dans la musique contemporaine ou classique. Nous ne créons pas uniquement pour un seul et unique public.
Je pense qu’elle aurait sa place auprès des musiques actuelles ou qu’elle pourrait être synchronisée dans des films ou tout ce qui pourrait décloisonner les esthétiques et les styles musicaux. La musique s’adresse à tous, peu importe le langage.
C’est par la danse que j’ai découvert la musique classique.
Un pianiste accompagnait mes cours et j’étais complètement fascinée. Résultat, j’ai demandé à mes parents d’apprendre le piano et après quelques années, j’étais plus intéressée par la conception des pièces que je jouais que par leur interprétation : je m’amusais en inventant des introductions ou en changeant les fins des morceaux. Sur les conseils de mon professeur de l’époque, j’ai pris des cours d’écriture et j’ai aussi étudié l’harmonie et le contrepoint.
Ma toute première pièce était pour flûte et piano, lorsque j’avais 13 ans. Je ne me souviens plus vraiment de la musique – je pense que c’est mieux ainsi – mais je me souviens du pourquoi et du comment !
Mon professeur d’écriture, pianiste, m’avait donné comme devoir pendant les vacances d’été de composer un court morceau qu’il interprèterait à la rentrée avec sa femme, flûtiste.
La rentrée arrive, j’ai les mains moites et je suis paniquée à l’idée d’entendre ce que j’ai écrit.
Finalement, c’est un moment magique, assez indescriptible et surtout intense.
C’est à ce moment-là que j’ai su que j’aimerais en faire mon métier.
Créer, c’est vivre. Créer, c’est une façon de voir le monde, une manière de le vivre autrement.
J’écris hors du temps, sans horaires fixes, à la maison, au calme absolu, entourée de la nature et de livres. C’est d’ailleurs dans la nature ou les autres arts que je puise mon inspiration.
Mon inspiration vient aussi de mes expériences. Pour mon prochain album, j’ai collaboré avec l’Orchestre national de Lyon et le chef d’orchestre Ben Glassberg et ça a été, non seulement, instructif mais aussi enrichissant, ce qui est l’essence même de ce métier : toujours chercher à se dépasser, à aller plus loin dans nos recherches.
Pour ma part, la Sacem m’accompagne et me soutient, depuis quelques années, notamment en bénéficiant d’aides à la résidence (festival de Besançon en 2021), mais aussi à la production et à la commande, à travers des projets portés par des festivals comme celui d’Ars Terras. Ces accompagnements me permettent me concentrer sur la création et donc, mes compositions.
La Sacem gère également nos droits d’auteur et protège notre travail. Le droit d’auteur permet à la fois de compenser les faibles rémunérations des compositrices et des compositeurs pour leur travail et le suivi de la vie de l’œuvre. Cela permet de contrôler qui joue quoi, où et quand. En effet, lorsque les partitions des œuvres sont éditées et que l’on peut les acheter, il peut devenir très vite impossible de savoir lorsqu’elles sont jouées. La Sacem a, donc un rôle essentiel et nous pouvons nous estimer heureux en France car le droit d’auteur ne fonctionne pas de la même manière dans d’autres pays.